vendredi 22 septembre 2017

La Bibliothèque de Mount Char


Scott Hawkins - La Bibliothèque de Mount Char - Denoël Lunes d’encre




Caroline says she can't help but be mean
Or cruel, or oh so it seems
Oh, Caroline says, Caroline says


Lou Reed





« Carolyn était une jeune Américaine comme les autres. Mais ça, c’était avant. Avant la mort de ses parents. Avant qu’un mystérieux personnage, Père, ne la prenne sous son aile avec d’autres orphelins. Depuis, Carolyn n’a pas eu tant d’occasions de sortir. Elle et sa fratrie d’adoption ont été élevées suivant les coutumes anciennes de Père. Ils ont étudié les livres de sa Bibliothèque et appris quelques-uns des secrets de sa puissance. Parfois, ils se sont demandés si leur tuteur intransigeant ne pourrait pas être Dieu lui-même.

Mais Père a disparu — peut-être même est-il mort — et il n’y a maintenant plus personne pour protéger la Bibliothèque des féroces combattants qui cherchent à s’en emparer.

Carolyn se prépare pour la bataille qui s’annonce. Le destin de l’univers est en jeu, mais Carolyn a tout prévu. Carolyn a un plan. Le seul problème, c’est qu’en le menant à bien elle a oublié de préserver ce qui fait d’elle un être humain. »



Premier roman d’un nouvel auteur, La Bibliothèque de Mount Char épate à plusieurs titres. Après avoir personnellement et récemment vécu quelques expériences de lecture décevantes, interrompues (La justice de l’ancillaire) ou achevées avec l’enthousiasme des enfants de jadis à qui on faisait ingurgiter de l’huile de foie de morue (Silo), voici enfin un page turner où le lecteur, transformé en Super Mario, rebondit de chapitre en chapitre et achève le dernier feuillet en deux trois coups de cuillère de nutella. Certes une narration soutenue ne garantit pas la qualité d’une production littéraire. Mais comment ne pas applaudir un auteur qui combine rythme et imagination délirante, sans compter une galerie de personnages aussi invraisemblables les uns que les autres ?


La Bibliothèque de Mount Char appartient à un genre qu’on pourrait qualifier de fantasy urbaine. Hormis l’influence globale de Lovecraft, sa facture hérite d’American Gods et aussi de la narration déjantée de Preacher. Dans ce récit mythologique évoluent un Dieu, qualifié de Père, deux prétendants à sa succession et une dizaine de créatures ayant troqué leur humanité contre un statut de divinité monstrueuse.


Père est un Dieu tout puissant. Il règne depuis 60 000 ans sur l’univers connu et sur la Bibliothèque. Préparant, tout en la retardant, sa succession, il réunit autour de lui une douzaine d’enfants qu’il éduque durement voire cruellement. Chacun est cantonné dans une discipline - un catalogue - et doit s’ y tenir sous peine de finir dans la chaudière du barbecue. Une mort affreuse mais provisoire grâce aux bons soins de Jennifer, la spécialiste en matière de résurrection. Cette perspective n’effraye pas Carolyn, maîtresse de tous les langages connus. D’ailleurs Père disparaît. Pour prendre sa succession il lui faut éliminer David, un colosse psychopathe qui a fait d’elle son souffre-douleur. Elle embauche une de ses anciennes connaissances, Steve, plombier ex cambrioleur et lui fait endosser un crime qu’il n’a pas commis. Le malheureux, malgré l’intervention d’Erwin ancien soldat d’élite, se retrouve dans les pattes de l’héroïne et assiste impuissant comme tout le monde à la destruction de la Terre. Mais que faire contre des divinités ?


On ne s’ennuie pas une seconde, entre les amours putréfiés de Margaret et David, les parties de barbecue et les virées de l’animal de compagnie de Steve chez le vétérinaire. Petit bémol, la séquence explication ralentit les cent dernières pages, mais ça passe. Bref c’est excellent, meilleur que Sandman Slim de Richard Kadrey.

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