dimanche 31 juillet 2011

Une partie de pêche avec Clifford D.Simak

Clifford D. Simak - Frères lointains - Le Bélial'



Si la nouvelle « La Grotte des cerfs qui dansent » constituait la surprise du précédent recueil Voisins d’ailleurs, la nouvelle anthologie Frères lointains parue aux éditions du Bélial' comporte une bien intéressante postface sur l’œuvre de Clifford Simak signée Philippe Boulier. Espérons simplement qu’elle ne ferme pas la porte de cette aventure éditoriale, car quelques textes fameux manquent encore à l’appel.


De toutes les nouvelles présentées « Mondes sans fin » parait la plus aboutie. Dans une société future dirigée par des guildes, l’un des responsables de l’une d’entre elles, la Guilde des rêves, découvre une conspiration. Cette guilde propose à ses clients un séjour en long sommeil peuplé de songes à la carte. Rêves truqués en fait. Ce thriller bien construit pourrait évoquer le film Total Recall. Mais Simak ne s’aventure pas dans les méandres dickiennes. La marque d’un texte des années 50.


L’anthologiste, Pierre-Paul Durastanti, propose deux récits d’exploration spatiale, typiques de l’âge d’or : « La planète des Reflets » et « Tête de pont ». Ils illustrent une caractéristique soulignée par Philippe Boulier et qu’atteste le titre des deux recueils du Bélial, l’absence d’agressivité des E.T. dans l’oeuvre de l’auteur de Demain les chiens. Au mieux un intérêt amusé dans la première nouvelle qui évoque une téléréalité avant la lettre, au pire une indifférence résignée dans « Tête de pont » texte à la chute certes prévisible, mais qui fleure bon son Bradbury. Des E.T tout à fait pacifiques annoncent à un avant poste expéditionnaire terrien qu’ils ne repartiront pas chez eux

En parlant de Bradbury, citons « Dernier acte » autre temps fort de Frères lointains, un petit bijou dont la concision évoque « The last night of the world » récit extrait de L’homme illustré.


« Le frère » et « Nouveau départ » font résonner la petite musique simakienne : un hymne à la Nature et des personnages incroyablement solitaires. Le premier traite du thème du double, avec une connotation fantastique représentative de l’inspiration de l’auteur dans les années 70. Un universitaire vient interroger sans succès un écrivain retiré du monde sur l’existence d’un frère mystérieux. On reconnaît sans peine Clifford Simak dans le portrait de cet ours mal léché. Le second, de qualité inférieure, justifie le titre de la postface de Philippe Boulier « L’Université Galactique au coin du bois ». Un pêcheur invétéré fait une chute accidentelle et se réfugie dans une maison surgie de nulle part. On retrouve le thème de l’apprentissage déjà évoqué dans la nouvelle « Le bidule » du précédent recueil Voisins d’ailleurs. On a tout à apprendre de l’Autre, fut il extraterrestre. Une réflexion subtile, moderne, (dés) servie par un texte moyen. Voilà toute l’ambiguïté de Simak.


« A l’écoute » fait écho à ce récit. Des savants rentrent en contact avec des télépathes pour tenter de résoudre le problème de la vitesse supraluminique. La nouvelle démarre sur les chapeaux de roues. Des ET télépathes aux prises avec le Big Crunch lancent un appel aux humains. « Le chagrin de cet avertissement ne venait pas de ce que l’univers finissait, mais de ce qu’il finissait avant que quelqu’un ne réussisse à le comprendre »

Encore un bon texte daté de 1978, presque un testament.


Comprenne qui pourra « L’Ogre ».


Moins surprenant que le premier recueil, Frères lointains ravira néanmoins les amateurs de Simak. Nouvelliste moins brillant que ses pairs Bradbury, Sturgeon ou Matheson, son œuvre sensible, nostalgique ne mérite pas l’oubli. Son originalité ? A l’opposé du travail d’un Michel Jeury par exemple, Clifford Simak choisit de fondre des textes de science-fiction dans des récits de terroir. « Le frère » en est l’exemple type : un space-opera vécu d’un fauteuil à bascule.

Un livre précieux en attendant la parution hypothétique d’un troisième recueil.

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