mardi 10 mars 2015

Les vingt ans de L’homme qui marche



Jirô Taniguchi - L’homme qui marche - Casterman




Le magazine de bandes dessinées KABOOM consacre dans son numéro 8 un dossier à L’homme qui marche. En effet Casterman sort une édition anniversaire augmentée (1995-2015) d’un des mangas les plus fameux de Jirô Taniguchi. La réalisation de l’objet est remarquable, ainsi qu’en témoignent  les scans ci-dessous (en faible résolution, blog oblige hélas).

Le mérite de la création de cet album charnière, avant l’illustrissime Quartier Lointain, en revient également, selon le préfacier Wladimir Labaere, à l’éditeur de la revue Morning qui incita Jirô Taniguchi à imaginer une histoire sans récit d’un promeneur. Une tradition picturale du paysage héritée des géniaux précurseurs Okuzai et Hiroshige qui ont bénéficié de l’ouverture de voies commerciales pour immortaliser leurs estampes.

Les 21 « stations » de ce manga illustrent des promenades dans lesquelles l’observation prend le pas sur l’anecdote. Même si celle-ci n’est pas forcément absente, elle aboutit à un acte contemplatif. « Sous le cerisier » par exemple contient quelques départs narratifs, une vidéo cassette égarée, la rencontre d’une jeune femme. Tout part et tout se termine par la vision des fleurs de cerisiers - quel dommage de ne pas avoir tenté la couleur ! -. L’auteur ne donne d’ailleurs que très peu d’informations sur le héros du manga. Il vit en couple dans une banlieue résidentielle de Tokyo et semble exercer peut-être un métier d’architecte.

Le graphisme alterne vues subjectives (l’œil du promeneur) et dessins intégrant le personnage dans le paysage. Le travail propre et détaillé de Taniguchi le rapproche de l’école de BD belge. Le magazine KABOOM fournit à ce sujet quelques analyses intéressantes complétées par une interview du dessinateur. Ces considérations spatiales ne sauraient occulter le sentiment d’une quête d’un temps retrouvé, d’une respiration ou plus simplement du bonheur qui se dégage de la lecture de ce bel album. 


Couverture verso sans jaquette
Couverture recto sans jaquette





1 commentaire:

Christiane a dit…

Le même tempo... Votre chronique est à l'amble du texte de Kundera trouvé par Jazzi et que je ne connaissais pas. Ce manga a l'air superbe. Je vais essayer de le trouver.
Je pense aussi à "L'Homme des foules" d'Edgar Poe (traduit par Charles Baudelaire.
Un homme attablé dans un café, à Londres, regarde la rue à travers les vitres du café. Surtout la foule. A la tombée du jour, il dort et marche, un peu rêveur., porté par le mouvement de la foule. Un inconnu passe, un vieil homme au regard vide. Il le suit à travers le brouillard de Londres, dans un dédale de rues obscures...
Vient ensuite Le Spleen de Paris...
Walter Benjamin aussi dans Le flâneur des passages parisiens..
Mais ma préférence va au promeneur solitaire et pensif.